23 janvier 2020 à 18 h 00 – salle Paul Pierrotet | M. Dan CULCER. Ecrivain & journaliste, rédacteur des revues « Vatra » et «Asymetria». |
Résumé
Le point de départ de mes réflexions et hypothèses sur l’identité, dans le cadre d’une existence en exil de plus de trois décennies, est l’observation des problèmes psychologiques et comportementaux causés par les pertes de « substance identitaire » chez les individus et les efforts que ces individus font, conscients des états négatifs vécus, pour retrouver leurs racines et leur substance identitaire. Les hypothèses seront développées de façon analogique. Je pars de l’idée banale que les souffrances des individus, leurs crises se reflètent dans le comportement de la communauté à laquelle ils appartiennent. J’utilise délibérément le mot « communauté » au lieu de nation afin d’éviter une discussion stérile sur la définition de la nation. Mais que se passe-t-il lorsque les phénomènes de crise d’identité n’atteignent pas le niveau de conscience ? Comment les individus ou les groupes réagissent-ils ? Comme dans toute situation analogue, des dérivés sont recherchés ou des transferts sont effectués vers d’autres domaines de comportement de crise. De là, nous croyons, avec les psychosociologues qui traitent de cette catégorie de phénomènes, surgissent les actes de violence, le déni d’autorité, la désintégration morale, la difficulté d’intégration sociale, avec des conséquences graves sur l’ensemble de la société. En tant qu’entité mondiale, soumise à des crises économiques cycliques ou chroniques, la société elle-même est touchée, travaillée, attaquée par les phénomènes de la crise morale mondiale, par les conséquences dramatiques des efforts d’adaptation.
Entre la critique de l’usage manipulateur et politique des mythes, une critique toujours nécessaire et urgente, et la critique destructrice des mythes identitaires eux-mêmes, ceux qui subliment l’identité „tribale”, il faut tracer une limite a ne pas franchir, pour réussir à endiguer le processus destructeur de l’identité, provoqué par une nouvelle idéologie opportuniste et globaliste.
Le signal d’alarme que la communauté donne, et que nous avons évoqué, ainsi que la lucidité projective et prospective, nous poussent à croire que quelque chose doit être fait pour ralentir et arrêter ces processus de désintégration sociale. Au moins pour permettre la stabilisation institutionnelle en Roumanie, comme dans d’autres pays d’Europe orientale, en renforçant le système juridique indépendant et en freinant l’exportation de nouveaux capitaux vers les marchés financiers occidentaux. La reconstruction se fait aussi à travers la diffusion culturelle et la réinitialisation des mythes qui se trouvent à la base de la société, au début de la chaîne trophique.
Cette action de résistance et de reconstruction n’est pas le rôle de l’État, d’un parti au pouvoir ou de l’opposition, pas même le rôle de l’école seulement. Certains organismes sociaux ou institutions ont naturellement tendance à utiliser les mythes à des fins politiques, et leurs objectifs politiques ne sont pas des objectifs d’intérêt général, bien qu’ils le devraient être. Dans ces conditions nous devons tous nous impliquer dans la recherche des solutions pour dépasser la crise.
Dan Culcer – CV
Critique littéraire, écrivain, poète, traducteur et journaliste roumain Dan Culcer est né le 15 juin 1941 à Sulina dans une famille de Roumains de Transylvanie en refuge, après le dictat de Vienne. Fils du médecin Alexandru Culcer et du professeur de langue roumaine Ersilia (n. Gutu) il fait ses études lycéales et universitaires à Cluj où il va être diplômé en 1963 de la Faculté de philologie de l’Université Babeș-Bolyai. Dans cette université il prépare pendant trois ans (1966-1969) un doctorat en littérature comparée pour devenir en 1970 chercheur au Centre de recherche de l’Académie de Târgu Mureș, ville où en 1971 il est un des fondateurs du magazine « Vatra » dont il est rédacteur jusqu’en 1987 puis, après 1990, rédacteur pour la France. En 1987 il part pour la France où il obtient le statut de réfugié politique. Naturalisé en 1992.
Écrits. Livres : « Un lieu géométrique », ed. Cartea Românească, Bucarest, 1973 ; « Lire et vivre la littérature », essais sur la sociologie de la littérature, ed. Dacia, Cluj, 1976 ; « Séries et groupes », essais sur la sociologie de la littérature, ed. Cartea Românească, Bucarest, 1981 ; « Utopie, textes pour un état », (poèmes), ed. Ardealul & Asymetria, Târgu Mureș – Elancourt, 2010, édition bilingue roumaine—l’originale et hongroise (traduction du poète Cseke Gábor) ; « Censure et idéologie dans le communisme réel », ed. Argonaut, Cluj-Napoca, 2016. 2 vol., 1558 p. Étude de politique sociale et culturelle. A l’origine, une thèse de doctorat soutenue en 2013, Université Petru Maior, Târgu-Mureș.
Traductions de hongrois: Domokos Samuel, « Octavian Goga, les annes de jeunesse », ed. Kriterion, Bucarest, Markovits Rodion, « Garnisonne de Siberie » (Prix de l’Union des écrivains en 1975), ed. Kriterion, Bucarest. Deuxième édition, ed. Dacia, Cluj, 2002.
A côté de son travail de rédacteur du magazine « Vatra » Dan Culcer collabore en Roumanie à des nombreuses autres revues telles : « Viața Româneasca », « Tribuna », « Steaua », « Familia », « România literară », « Acolada » http://www.editurapleiade.ro/arhiva.html,
« Confessions » https://centrulbrancusi.ro/confesiuni-nombre-53/
En exil, il collabore avec les magazines « Hermes » (CNRS), « Iztok », « Cahiers de l’Est », « Lupta », « BIRE » (France), « Curentul » (Allemagne), « Origini » (USA). Il participe à des émissions de Radio Solidarnosc (Paris), Radio France Internationale, BBC. Traducteur – Interprète de roumain pour TF1, La 5, France 2, lors des événements en Roumanie (décembre 1989 – janvier 1990).
Fonde le 13 mai 1991, avec d’autres journalistes roumains en exil, l’Association des journalistes roumains occidentaux, basée à Paris.